Quand la mémoire se lève : de Paris aux rivages ivoiriens, repenser l’héritage de l’esclavage

16 - Décembre - 2025

La Bibliothèque nationale de France a accueilli ce lundi 15 décembre 2025 une rencontre d’une portée intellectuelle et mémorielle remarquable, intitulée « Esclavages et héritages : vers un nouvel élan de la recherche ». Dans ce lieu emblématique du savoir et de la transmission, chercheurs, responsables institutionnels, acteurs associatifs et personnalités engagées se sont retrouvés pour interroger l’histoire longue de l’esclavage, ses persistances et les responsabilités contemporaines qui en découlent. Au-delà des communications scientifiques, la rencontre a surtout donné à voir une volonté partagée de replacer l’Afrique et ses diasporas au cœur du récit historique mondial.

L’esclavage n’est pas seulement une page sombre du passé, figée dans les archives. Il est une fracture profonde dont les ondes traversent encore les sociétés modernes, dans les rapports économiques, culturels et symboliques. Pendant des siècles, des millions d’hommes, de femmes et d’enfants arrachés à leurs terres ont été réduits à l’état de marchandises, privés de nom, de langue et de mémoire. La traite et la colonisation ont laissé derrière elles des silences, des lieux abandonnés et des récits fragmentés. C’est précisément contre cet effacement que se sont élevées les voix réunies à Paris, animées par la conviction que la connaissance historique est une condition essentielle de la dignité et de la justice.

La Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage, présidée par Monsieur Jean-Marc Ayrault, ancien Premier ministre, a une nouvelle fois affirmé son rôle central dans ce combat. Par son engagement constant, la fondation œuvre à faire dialoguer la recherche, les institutions et les sociétés civiles autour d’une mémoire partagée, lucide et apaisée. La présence de Madame Christiane Taubira, ancienne ministre et garde des Sceaux, invitée d’honneur et conférencière, a conféré à cette rencontre une intensité particulière. Figure majeure des luttes mémorielles, elle a rappelé, avec la force de la parole et la profondeur de l’analyse, que reconnaître l’esclavage comme crime contre l’humanité n’est pas un acte symbolique isolé, mais un point de départ vers une relecture honnête de l’histoire et une refondation des liens entre les peuples.

C’est dans ce contexte que la participation du Président SOKO Soko a pris tout son sens. En honorant l’invitation de la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage, il a porté la voix de l’Afrique et plus particulièrement celle de la Côte d’Ivoire, pays dont l’histoire est intimement liée aux routes de la traite et aux logiques coloniales. Sa présence n’était ni protocolaire ni circonstancielle. Elle s’inscrivait dans une démarche réfléchie et résolument tournée vers l’avenir, matérialisée par un avant-projet ambitieux intitulé « Côte d’Ivoire – Sur les traces de la traite et de l’esclavage ».

Ce projet, encore à l’état d’ébauche mais déjà porteur d’une vision claire, vise à réhabiliter les anciens comptoirs liés à la traite pour les transformer en musées et en lieux de mémoire. Il s’agit de redonner une visibilité à ces espaces longtemps laissés à l’abandon, de les inscrire dans un parcours historique et pédagogique capable de restituer la complexité de la traite, de la colonisation et de leurs conséquences. En faisant de ces sites des lieux de transmission, la Côte d’Ivoire entend assumer pleinement son histoire, sans complaisance ni déni, et offrir aux générations futures des outils pour comprendre le passé afin de mieux construire l’avenir.

À travers cette initiative, le Président SOKO Soko affirme une conception exigeante de la mémoire, non comme une lamentation figée, mais comme une ressource vivante. L’Afrique n’y apparaît pas seulement comme un continent victime, mais comme un acteur conscient, porteur de projets, capable de proposer au monde une autre manière d’aborder l’histoire globale. La Côte d’Ivoire, par ce travail de réhabilitation et de muséification, se positionne comme un espace de dialogue entre l’Afrique, l’Europe et les Amériques, un carrefour où les mémoires dispersées peuvent se rencontrer et se répondre.

La rencontre de la Bibliothèque nationale de France a ainsi dépassé le cadre académique pour devenir un moment de convergence des consciences. Elle a rappelé que la mémoire de l’esclavage n’est ni l’affaire d’un seul peuple ni celle d’un seul continent. Elle engage l’humanité tout entière. En réunissant des personnalités de premier plan, des chercheurs et des porteurs de projets venus d’Afrique, elle a ouvert une perspective nouvelle, celle d’une recherche et d’une action mémorielles partagées, capables de transformer les blessures du passé en leviers de compréhension, de reconnaissance et de dignité retrouvée.

               Malick Sakho

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