Modou- modou d’Italie : " vivere tra le nuvole"
Cette expression italienne signifie en français vivre dans les nuages. Elle signifie être rêveur, avoir l'esprit ailleurs, perdre le sens de la réalité. Après 50 ans d'immigration en Italie, le constat est amer pour les " modou - modou" d’Italie ; il s'est avéré qu'ils sont totalement déconnectés des deux réalités du pays de départ mais surtout et c'est plus grave et plus dangereux celle du pays d'accueil car cela pose le problème de l'intégration sociale de la " communauté" sénégalaise. L'intégration des sénégalais est un problème ; ils ont délibérément choisi de vivre dans la périphérie de la société italienne. Après presque 50 ans d'immigration donc de vie commune avec les italiens, est-il normal ou logique à parler d'associations d'immigrés ? Continuer à vivre dans la périphérie de la société italienne est-il un modèle d'intégration ? Après 50 ans de résidence continue en Italie, les sénégalais devraient vivre en citoyen ; la citoyenneté au-delà de l'obtention du passeport italien est une condition juridique mais surtout sociale de qui se sent appartenir à un Etat, à une société de résidence surtout quand celui-ci ou celle-ci est le pays de naissance de ses propres enfants. De cette condition de citoyen dérive son droit de reconnaissance des droits civiques, civils, sociaux, économiques et politiques. La citoyenneté ou se reconnaitre citoyen italien implique un droit principal et / ou devoir principal de participer à la vie publique et politique mais aussi et surtout le devoir d'être utile à cette nation d'accueil en respectant ses lois, ses normes sociales et ses règles de vie. Le plus important aspect de se montrer un citoyen républicain dans ce pays d'accueil passe nécessairement par la réussite éducative de nos enfants ; un important levier dans le dialogue social et une participation active et productrice en Italie en respectant ses lois, ses normes et ses règles de vie tout en conservant sa propre culture. Mais qu'en est-il de la " communauté sénégalaise ? D'abord et c'est important les sénégalais en Italie constituent-ils une communauté, un groupe social pour avoir une seule voix face aux autorités italiennes ? Tous les sénégalais qui vivent en Italie sont au moins d'accord sur une chose, et une seule chose ; ils ne sont jamais ensemble et ils ne seront jamais d'accord pour constituer une communauté avec ce vouloir commun de vivre en commun. Le principe des " modou- modou" d'Italie est et reste chacun pour soi et Dieu pour personne car en tant que croyants musulmans et catholiques, notre principe d'être une communauté soudée devrait au moins passer par ce principe que tous les croyants en Dieu sont des frères. Tout au plus, les sénégalais qui vivent dans une même ville, une même région en Italie ont essayé de créer une association. Certaines associations sont même créées par des sénégalais originaires de la même ville ou de la même région au Sénégal. Malheureusement plus de 150 associations sénégalaises pour 20 régions italiennes démontrent notre difficulté de vivre en communauté ; plus de 150 associations avec plus de 30 ans d'activité qui ne peuvent démontrer aucun résultat pour la communauté sénégalaise ou pour le travail de l'intégration des sénégalais en Italie. 50 ans de vie en Italie, les sénégalais ne gèrent aucun levier socio- économique en Italie, ne possèdent aucune structure ou infrastructures en Italie ; ni une mosquée, ni une salle de réunion : Même pour organiser des élections, des réunions de nos organisations sociales, les sénégalais dépendent des églises, des structures communales ou des structures des autres nations d'immigrés. Pour organiser les élections législatives en 2022 a Venise, la communauté bengalaise avait mis gratuitement leur siège à la disposition des sénégalais. De 2021 à nos jours, les sénégalais se sont particularisés pour un fait inédit ; ils sont quasi la seule communauté à battre le macadam pour des manifestations politiques violentes qui sont terminées par la destruction du consulat du Sénégal à Milan à l'instar des consulats de Paris, New York etc... Pourtant l'Etat italien à travers le texte unique sur l'immigration avait institutionnalisé les associations des immigrés comme instrument d'intégration sociale. L'article 42 du texte unique sur l'immigration, dans ses mesures d'intégration sociale reconnait à tous les immigrés en Italie le droit de créer des associations comme premier interlocuteur entre la communauté et les autorités municipales, provinciales, et régionales en Italie. Prévues par les lois italiennes sur l'immigration, les associations permettent aux immigrés de montrer leurs présences en Italie à travers des activités sportives, culturelles et sociales pour défendre leurs intérêts et leur identité. Malheureusement, les sénégalais et leurs associations n'ont pas compris cette philosophie des autorités italiennes, pire les associations ont été un des grands facteurs de division de la communauté et d'éloignement de la société et des institutions italiennes car les sénégalais n'ont jamais compris et n'ont pas travaillé dans le sens de l'objectif de l'intégration sociale. Carisismi (mes très chers) " modou- modou", charité bien ordonnée commence par soi-même. La mission de tout père de famille est d'abord de s'occuper de sa propre famille. Nous modou- modou, nous sommes en train de faillir cette mission que Dieu nous a assignée à travers la Bible et le Coran. Selon les statistiques du ministère du travail italien sur les différentes communautés d'immigrés en Italie, l'échec des enfants sénégalais dans le système scolaire doit être une préoccupation ; plus de 70% des enfants nés ou grandis en Italie de parents sénégalais âgés de 18 à 23 ans ont abandonné l'école italienne en 2022. Pour certains parce que les parents ont préféré envoyer leurs enfants dans les champs et les fabriques, et les hôtels pour un revenu financier de plus dans la famille. Pour d'autres qui laissent l'école, des parents analphabètes ne voient dans l'immédiat l'intérêt des études ; mais aussi ne disposent pas de moyens financiers pour investir sur les études des enfants. Depuis la Covid 19, beaucoup de parents ont ramené leurs enfants au Sénégal. Beaucoup de jeunes sénégalais âgés de 18 à 23 ans sont dans la rue, les jardins publics, les esplanades des gares et des centres commerciaux et sont une proie facile pour tous les types de criminalité. Déjà en 2018, selon un rapport de la police pénitentiaire italienne, les sénégalais avec 504 prisonniers étaient la 7° communauté dans les prisons derrière le Maroc (3733), l’Albanie ( 2543 ), la Roumanie ( 2524 ), la Tunisie ( 2043 ), le Nigéria ( 1615 ) et l'Égypte ( 516 ). Selon un rapport de la S.I.P.A.D. (société italienne des pathologies addictives), les sénégalais sont de plus en plus impliqués dans le trafic de la drogue. Depuis 2013, plusieurs opérations anti-drogue des forces de l'ordre épinglent de plus en plus de jeunes sénégalais dans le trafic de drogue. Depuis 2013, l'opération " Vicoli bui" (ruelles sombres) s'était conclue à Gênes (Genova) avec l'arrestation de 38 jeunes sénégalais. En 2015, toujours à Gênes, une bande de jeunes sénégalais dont le chef avait 23 ans était accusée d'avoir assassiné un jeune algérien pour vol de quelques doses d'héroïne. Dans cette affaire, la police italienne avait découvert en même temps un trafic de faux documents belges et français. En 2016, une autre enquête de la douane italienne à Pescara dans le trafic de la drogue avait mis en cause 29 jeunes sénégalais dont 8 en prison, 11 assignations à domicile et 10 sous contrôle judiciaire. De 2007 à 2016, un groupe de 3175 sénégalais, sont en état d'arrestation ou signalés pour des délits selon les articles 73 et 74 du texte unique sur les stupéfiants surtout à Turin, en Lombardie, à Lazio, en Ligurie, et Emilie Romagne. Le nombre de jeunes sénégalais en prison en nette croissance explique les nombreuses visites du consul de Milan entre 2022 et 2023 dans les prisons de sa circonscription dans le nord de l'Italie. Malheureusement, le consul de Milan n'est pas soutenu dans son action humaine et humanitaire ni par les associations sénégalaises, ni par les dahiras, ni même par les parents sénégalais dont les enfants sont en prison pour des années. L'Etat italien en favorisant le regroupement familial avait pensé à une forme de prévention sociale ; en autorisant l'arrivée de la femme et de ses enfants, l'immigré éviterait de rentrer dans des difficultés judiciaires. L'immixtion des sénégalais de la diaspora d'Italie dans la politique sénégalaise a bouleversé les rapports sociaux dans la communauté sénégalaise. En politique, plus populiste qu'un " modou- modou" tu meurs. Ils mettent souvent en exergue, les énormes sommes d'argent (1700 milliards en 2022) que la diaspora envoie au pays. Revenez sur terre pour vivre la réalité, un modou -modou ne fait pas plus qu'un riziculteur de la vallée, un maçon ou un fonctionnaire. Chaque immigré envoie la dépense quotidienne pour faire vivre sa famille ; ce que tout père de famille au Sénégal fait pour sa famille. Totaliser toutes les sommes d'argent envoyées par les immigrés pour la défense quotidienne pour en faire une arme politique, de menace et de chantage est juste du populisme car une goutte d'eau comparée à ce que donnent les pères de famille au Sénégal. Pour parler de poids électoral, les chiffres de la commission électorale sénégalaise confirment les propos de l'honorable Barthélémy Dias sur le poids insignifiant de l'électorat de la diaspora qui se limite à presque 4%. Depuis 2000 avec 3,9% de l'électorat national, le poids de la diaspora ne frise même pas la moitié de la moyenne nationale de 10%. Donc le vote total des modou - modou ne peut en aucun cas changer le résultat final d'une élection présidentielle en votant un candidat ou en faisant abstention totale. Par exemple pour les élections législatives de 2022, le total des inscrits de la diaspora avoisine 206.000 ; ainsi avec une moyenne nationale de 55.000 électeurs pour un député, la diaspora ne devrait même pas avoir 4 députés. Aujourd'hui, l'entrée de la diaspora dans la vie politique a annihilé quasi complétement toutes les relations sociales que les dahiras et les associations ont peiné à construire. A cause de la politique, les sénégalais en Italie se regardent en chien de faïence. Rien n'est plus possible de sociabilité entre les modou- modou ; on ne partage plus, le dahira, la religion, le tarikha ou l’association ; toutes les nouvelles relations sociales dans la communauté sénégalaise sont déterminées par l'appartenance au même camp politique voire qui est dans le système est un ennemi qu'on peut éliminer même physiquement. L'appartenance familiale, la même origine sociale ou géographique et pire la même appartenance chrétienne ou musulmane n'ont plus de sens, on se connait si et seulement si on est dans le même camp politique. La politique sénégalaise en Italie a fait des " modou -modou" des sénégalais entièrement à part qui n'ont plus des relations sociales mais des relations politiques. Les Modou-modou et leurs enfants sont une génération sacrifiée, une génération qui s'est sacrifiée car tous les sénégalais quelque soit leur appartenance socio- culturelle considèrent les " modou - modou" comme des " Baye Seikh" ; un type ostentatoire, avec un instinct grégaire très marqué, un altruisme irréfléchi et une vache à lait que les jeunes filles, les femmes, certains guides religieux, les artistes et aujourd'hui la classe politique utilisent juste pour son lait. Les " modou - modou" vivent empathie et altruisme ; c’est cette sincère ostentation ou recherche d'une personnalité sociale que le statut de modou- modou confère virtuellement. Revenons à l'évidence de vivre et de faire vivre nos familles en citoyens républicains, participatifs au développement de l’Italie ; notre pays d'accueil et de naissance de nos enfants.
Magatte Simal C.A.D.E.E.S. Italie
